Le mythe de la « dominance »
« On me dit que je dois retirer la gamelle à mon chien pendant qu’il mange, pour lui montrer que c’est moi le chef de meute. C’est pénible, il grogne, il a même failli me mordre ! »
« On m’a toujours expliqué que je devais manger avant mon chien pour lui montrer ma dominance sur lui. »
« Si mon chien monte sur le canapé, il est à la même hauteur que moi, ça veut donc dire qu’il veut me dominer ? »
« On m’a dit que je devais prendre mon chien par la peau du cou et le maintenir couché pour lui montrer qu’il doit rester à sa place. »
Des phrases comme celles-ci, j’en entends régulièrement.
Le loup et le chien aurait en commun un ancètre qui aujourd’hui n’existe plus (source : « Genes Suggest Dogs Descended From a Now-Extinct Breed of Wolfby », par Alan Boyle – janvier 2014)
Le chien n’est pas un loup :
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Selon les dernières études (il existe des désaccords sur l’ancienneté, pouvant aller jusqu’à 30 000 ans), le chien aurait été domestiqué par l’homme il y a au moins 10 000 ans
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il a appris à vivre auprès des hommes, à les observer et à interpréter ses modes de communication (expressions faciales, réponse au pointé de doigt, notamment)
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il ne présente pas les mêmes comportements que le loup dans la résolution d’un problème : le chien recherchera l’aide de l’humain, alors que le loup sera aidé de ses congénères
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il digère l’amidon (contrairement au loup), Cliquez ici pour en savoir plus
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le chien est un animal social (notion de vie dans un groupe social) mais, contrairement au loup, il ne vit pas en « meute » (la meute de loups est un groupe familial composé des parents et des louveteaux). Cela signifie qu’à son arrivée au sein du foyer familial, le chien intègre notre groupe social, mais nous ne constituons en aucun cas une meute avec lui (tout simplement parce que nous ne sommes pas de la même espèce).
Grâce à la science du comportement animal, l’éthologie, grâce également aux neurosciences, on sait qu’il n’existe aucune preuve de l’existence d’un lien de « dominance-hiérarchie » entre deux espèces différentes, puisque les codes de communication sont différents et que deux espèces différentes appartiennent à deux groupes sociaux distincts l’un de l’autre.
Dans son livre « Er redete mit dem Vieh, den Vögeln und den Fischen » écrit en 1949, Konrad Lorenz, biologiste et éthologue autrichien, développa cette notion de dominance-soumission, qu’il tira à la fois d’observations de ses chiens en l’élargissant à la relation humain-chien (le plus fort et le plus agressif, le « dominant » et le plus faible adoptant une posture de « soumission ») et des méthodes et outils coercitifs utilisés par l’armée allemande pour leurs chiens de travail.
Dans les années 1970, des scientifiques, biologistes, éthologues, renforcèrent cette notion de dominance-hiérarchie lors d’observations de loups, en avançant la nécessité de démonstration d’agression pour asseoir un certain statut social.
L. David Mech, scientifique spécialiste du canis lupus, a participé à ces recherches. Il s’est rétracté dans les années 2000 en expliquant dans une vidéo que la vision du loup avait changé depuis les années 70, qu’un loup n’obtenait pas son statut de chef de meute par la force mais à travers son statut de chef de famille, la meute de loups étant composée des parents et des louveteaux.
Cliquez ici pour écouter L. David Mech parler du « loup alpha » – vidéo originale
Cliquez ici pour voir la vidéo sous-titrée en français
Ce mythe de la « dominance » a causé et cause encore beaucoup de dommages aux chiens :
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alpha roll (mettre le chien sur le dos et le maintenir dans cette position),
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coups de saccade avec la laisse causant un étranglement, de la douleur et un écrasement de la trachée,
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utilisation de la contrainte (par exemple, faire s’asseoir le chien en lui appuyant sur le sacrum),
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utilisation de l’intimidation (crier, s’imposer physiquement),
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utilisation de la force (violence physique, soulever le chien et le maintenir en l’air, coups de pieds ou de genoux, etc.),
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utilisation d’outils coercitifs tels que le collier étrangleur, à pointes, électrique, à la citronelle, la cravache, le journal roulé, etc.
Les conséquences sur le chien sont souvent désastreuses : humiliation, perte de confiance, crainte, inhibition, état de détresse acquise, frustration, comportement d’agression, etc.
Est-ce vraiment cela que nous voulons pour nos chiens ?
N’hésitez pas à visionner également :
– « Malignant Behavior: The Cesar Millan Effect »
– Tough Love: A Meditation on Dominance & Dogs
Article rédigé par Pascale de Mon Chien Relax avec mes remerciements 🙂